Matthew Rose, un artiste surréaliste

Matthew Rose est un artiste américain pluridisciplinaire. Vous souvenez-vous de l’anecdote de notre rencontre ? C’est lui qui m’a contactée par le blog il y a quelques mois au sujet d’une relation commune, Monsieur Léo. Une belle histoire triste à découvrir ou à redécouvrir ici. Bref, et depuis une amitié est née faite de conversations autour de verres de vin, de balades et de discussions artistiques. Et parce que j’apprécie beaucoup son travail et ses inspirations j’avais envie de vous le présenter pour partager avec vous son univers.

La série érotique « Petites Announces »

Quand j’arrive chez Matthew Rose le jour de notre rendez-vous pour créer cet article je découvre son appartement atelier dans le quatorzième arrondissement de Paris. C’est un bazar organisé avec des pots de peinture, des pinceaux, des papiers, des livres, des cadres, des pots de colle, et tout un attirail de papeterie.

Appartement-atelier de Matthew Rose, ParisAppartement-atelier de Matthew Rose, Paris

Ce jour-là il me montre sa nouvelle série, « Petites Announces ». C’est une série peinte avec des collages sur la thématique des sexes d’homme. Il m’explique que le pénis est « comme un monstre« . Il avait en tête une idée à mi-chemin entre le correspondant d’âme de chacun et l’acte sexuel. Selon lui il faut « soulager le désir qui pousse » ; il cherche alors une idée artistique liée à la chair, assez floue au départ. Selon Matthew le sexe « c’est comme une sorte de dessert, de cake, de bonbon. C’est un délice. » Drôle de truc que de faire le portrait de quelqu’un par son sexe ! Il me dit aussi : « quand tu rêves de quelqu’un que tu as perdu, parfois il ne reste que les traces sexuelles« . Pas faux dans le fond. Et puis ce qui est vraiment génial dans cette série, c’est la dérision issue des légendes car chaque portrait possède son étiquette, comme une légende à la fois abstraite et terriblement drôle. Un pénis porte par exemple une légende « Guide véritable des Maisons de Plaisirs« , un autre la légende « Aphrodisiaques à 25, 50 et 75 fr. en Caoutchouc« , encore un autre « Scènes inouïes !  » Ces petits textes cocasses sont issus de vieux journaux français des années 50, mais leur association avec les compositions donne un résultat vraiment amusant, alors que comme le dit très justement Matthew, le sexe est « un truc un peu moche qui obsède les gens« .

Something you never seen before, "Petites Announces", gouache sur papier, 2018, Matthew Rose

Erector, "Petites Announces", gouache sur papier, 2018, Matthew Rose

Série "Petites Announces", gouache sur papier, 2018, Matthew Rose

Ses inspirations artistiques

& le processus de création

Matthew Rose dessine depuis l’âge de cinq ans. Il dessine sur tout, des photos, des cartons, toutes sortes de papiers parce que « le papier c’est facile« . C’est un amoureux du papier et il aime particulièrement la texture de celui des années 50 qu’il collectionne comme les images. Pour un enfant de cinq ans le mot c’est comme une image, et c’est d’ailleurs certainement grâce à ce concept de « Word as image » que naît l’envie de Matthew de faire des études de linguistique et de sémiologie à l’université.

Plus tard sa curiosité le conduit à étudier et à admirer des artistes peintres, collagistes modernistes, expressionnistes abstraits, surréalistes, pop comme Philip Guston, Joseph Cornell, Ray Johnson, Jasper Johns, ou Robert Rauschenberg. Ces artistes influenceront définitivement le travail expérimental de Matthew qui dit : »Quand j’ai une idée en tête il faut que je voie le résultat. Ca m’intéresse de voir ce que ça donne. Il faut tenter à l’aveugle. Il y a de l’inattendu dans la vie ; la composition nait aussi pendant l’acte de création ».

Son art est obsessionnel. On retrouve dans presque toutes ses compositions des cercles, des roues, et des personnages dessinés des années 50 en écho à son enfance perdue. Il met aussi en scène tout un bestiaire, le « bestiaire Rose », qui se compose principalement d’insectes volants et d’oiseaux. Quoique ces dernières semaines sa série d’animaux qui parlent a largement étoffé son bestiaire avec des rongeurs, des bovins, des poissons, des chats, des singes, etc… Une drôle de ménagerie pleine d’humour et d’originalité avec des messages comiques qui tournent en dérision l’actualité : un chien dit « I ate Hillary’s emails », tandis qu’un crapaud dit « Enough science already ! » et des sangliers disent  » Looking forward the royal wedding! » Matthew pense que « L’inspiration c’est sortir de sa zone de confort« . D’ailleurs au sujet de la famille royale, figurez vous qu’il a été jusqu’à offrir à la Reine Elisabeth II d’Angleterre une composition de son profil peint sur un carton d’emballage de Monsieur Propre. Un cadeau que Buckingham Palace a gentiment renvoyé à son expéditeur car Sa Majesté n’accepte pas les cadeaux, exception faite pour ceux qui sont offerts dans un cadre officiel… 🙂

Mais certaines oeuvres sont néanmoins beaucoup plus profondes et sérieuses ; Matthew Rose peut aussi dénoncer et contester grâce à ses oeuvres plus engagées comme SLAVE qui dénonce la colonisation, ou Take Drugs qui signale la prise de dopants par des sportifs rongés par la compétition, ou encore Visit Iraq avec cette silhouette cagoule qui dénonce les tortures perpétrées par les soldats américains envers les terroristes lors de la guerre en Iraq.

Roma Fade, Collage Matthew Rose, 2017

1000 Queens, Letter to HRH Queen Elisabeth, 2015, Matthew Rose

SLAVE, 2008, Matthew Rose

Visit Iraq, graphite on paper, 2008, Matthew Rose

Take drugs, graphite and color pencil on paper, 2008, Matthew Rose

Le projet « A book about death »

En 2009 Matthew Rose lance un projet d’envergure mondiale. A book about death est un travail collaboratif auquel ont participé environ cinq cents artistes à travers le monde sur la thématique de la mort. Chaque artiste a eu carte blanche pour illustrer le thème de la mort dans un format carte postale, comme page intégrante du « Livre ». Matthew Rose a exposé ce projet en septembre 2009 à la Emily Harvey Foundation Gallery à New-York et a connu un grand succès. Au point que l’exposition a franchi les frontières puisqu’elle s’est exportée en Floride, en Pennsylvanie, à Venise, à Sao Paulo et jusqu’en Australie !

Chaque artiste y est allé de sa vision, de son concept, de son inspiration. Regardez en images A book about death, un film d’Angela Ferrara qui résume parfaitement l’ampleur du projet et sa préparation. Sur les conseils de Matthew, le film est organisé en chapitres par sujets (la maladie, les oiseaux, les poissons, les arbres, les squelettes, les mains, la vieillesse, etc…) comme des couplets musicaux dont la musique créée par le compositeur Garry Schyman apporte davantage de force, d’ampleur et d’universalité. Nous ne sommes pas éternels.

 

En définitive Matthew Rose est complexe qui déclare lui-même qu’il « faut accepter de ne pas tout comprendre ou tout expliquer en art« . Un artiste qui met ses obsessions et ses inspirations au service de son art, et qui a bien d’autres cordes à son arc car il est aussi musicien (guitare et mandoline) à ses heures perdues, et critique d’art indépendant pour The Art Blog, mais aussi le New York Times ou le Wall Street Journal.

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Pour info Matthew expose jusqu’au 15 juin à la galerie LA LA LANDE

dans l’exposition 1480 KM au 14 rue Lalande, 75014 Paris.

Ways to disappear, Collage 2017, Matthew Rose

Blue Janes, gouache sur papier, 2007, Matthew Rose

Hitchhiker (Napier Airways), 2016, Matthew Rose

Three pots, Matthew Rose

Les Affaires, 2009, Matthew Rose

3 thoughts on “Matthew Rose, un artiste surréaliste

  1. Great article about an amazing artist. J’adore le travail de Matthew Rose, tellement poetic….

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