Actuellement à Paris dans la nef du Grand Palais la dixième édition de Monumenta est surprenante d’originalité. Etrangeté, bizarrerie et caractère semblent être les premiers qualificatifs de l’œuvre magistrale du Chinois Huang Yong Ping, Empires. J’ai eu la chance de la découvrir vers minuit dans le cadre de la nuit européenne des musées.
Sous la verrière magnifique du Grand Palais imaginez une installation spectaculaire. C’est une fable philosophique qui met en scène quelques grands thèmes de notre paysage économique. Huit montagnes de conteneurs représentent la mondialisation et la circulation des richesses. On se croirait au port commercial de Dunkerque avec des millions de tonnes de marchandises si bien qu’au premier abord l’exposition semble inachevée, comme si les techniciens avaient oublié sur site les conteneurs de transport de l’œuvre. J’observe cette monumentale exposition et j’en discute même avec d’autres visiteurs à la mine déçue. Il convient de comprendre le message de l’artiste.
En contournant ces pyramides de couleurs on distingue petit à petit le squelette d’un animal démesurément gigantesque face auquel on semble minuscule, au point qu’on se croirait transporté dans le monde des Minimoys. Ce n’est pas un dinosaure mais bel et bien un serpent métallique dont le squelette volant se répand comme une brume maléfique entre les montagnes. Il est sournois, insidieux. Il est un parasite malveillant qui rend malade les peuples et les divise.
Au centre de l’installation, un chapeau bicorne à la taille disproportionnée évoque le couvre-chef de Napoléon. Ce conquérant qui a marqué l’histoire par son ambition et ses conquêtes est toujours d’actualité car politiques, industriels, chefs militaires et dictateurs rêvent tous aujourd’hui de porter ce chapeau du pouvoir et de l’immortalité. Et pour eux la fin justifie les moyens : mensonge, tromperie, dissimulation, meurtres et complots sont légion. Seul le reptile pourrait menacer leur ambition infinie, laquelle est habilement symbolisée par la boucle de son corps. Il faut vaincre le mal par le mal.