A l’idée de partir retrouver ma ville de cœur le lendemain matin, je ne parviens pas à m’endormir. Il faut pourtant que je me repose car le réveil est prévu à l’aube. A 5h du matin le soleil est déjà levé, c’est agréable l’été à Paris. Direction l’aéroport et les rapides logistiques bagages, sécurité et embarquement qui sont toujours trop longues à mon goût. Je tombe de sommeil dans l’avion pour me réveiller doucement juste quelques minutes avant l’atterrissage: l’Andalousie est là, juste dessous nos pieds, éclatante telle que je l’ai laissée la dernière fois. Les petits villages blancs se détachent parmi les champs d’oliviers qui couvrent les terres à perte de vue. L’excitation nous emporte : nous sommes arrivées!! A la descente de l’appareil le tarmac est déjà brûlant, il est presque midi et le ciel bleu d’Espagne est radieux, profond, immense.
Ellipse.
Séville, ses rues chaudes et belles. En remontant l’avenue de la Constitution la cathédrale s’impose au voyageur, toujours majestueuse de beauté. Je suis encore éblouie par son architecture de dentelles qui se découpe dans le bleu d’un ciel plein, et par la beauté des orangers en fruits sous lesquels se reposent les chevaux des carrosses à touristes. Dans ce quartier très fréquenté à deux pas de Santa Cruz, les fontaines chantent, les balcons sont en fleurs, et les lourds stores en cordes pendent aux fenêtres pour protéger les intérieurs du soleil. Les bars à tapas sont encore vides, il n’est pas assez tard pour déjeuner à l’heure espagnole. Pourtant la sangria serait rafraîchissante.
Ellipse.
Alors que le soleil est encore haut et chaud en ce début de soirée nous partons assister à un spectacle de danse au Museo del Baile Flamenco. Le lieu n’a pas changé et je retrouve mon ancienne salle de classe avec émotion. Ce soir, deux de nos anciens professeurs dansent : Rosa Belmonte et Daniel Torres, un talent et une humilité hors normes. Elle et lui ensemble sur la même scène comme il y a deux ans, un bel écho à des sensations fortes toujours ancrées en moi. Le silence s’impose, la guitare s’exprime, elle monte alors sur la scène dans une magnifique bata de cola rose assortie d’un châle à franges or. Son visage est racé et son corps exprime le même langage. Mystérieux. Ses postures sont superbes de caractère, elle excelle et impressionne. Le public retient son souffle tellement elle est ensorcelante.
Puis il arrive à son tour. Ses chaussures rouges vernies ne sont plus un détail, on ne voit qu’elles et chacun attend qu’elles se mettent à danser. Mais elles sont sur la réserve, et lui est charismatique. Et tout d’un coup tout éclate, il lâche les taureaux et c’est un combat. Ses tacones sont incroyables de clarté et de force, leurs sons éclatent dans mes oreilles. On dirait un torero qui cherche à maîtriser son art. Il est fort et fier, puissant et noble. C’est indescriptible. Ca se vit.
Accalmie. Le solo de guitare débute, je ferme les yeux et je m’évade dans l’Andalousie profonde, celle des taureaux et des propriétaires d’haciendas, celle des gitanes qui pleurent et des ruisseaux qui chantonnent, celle des petits clochers et des maisons blanchies à la chaux, celle des jambons qui sèchent et des champs d’olivier. Ca y est, vous y êtes?
A l’idée de quitter ma ville de cœur le soir même, je suis déjà triste, c’est un goût de trop peu et tout est passé trop vite. Je descends sur la côte andalouse pour d’autres aventures et je reviendrai à Séville dans quelques jours. Mais je me fais déjà la promesse de revenir y séjourner car Sevilla y flamenco son mis dos amores, como si fuera nacida de estos dos universos. Je suis tellement contente que le flamenco fasse partie du patrimoine culturel immatériel de l’humanité. Après une semaine là-bas, je sais que ce retour en terre sainte a été une vraie bouffée d’oxygène.