A l’affiche du théâtre des Nouveautés depuis le 20 janvier 2012, la pièce de Jean Dell, Un stylo dans la tête avec Francis Perrin. L’histoire est à priori intéressante puisqu’il s’agit du sujet de la nouvelle comédie de Victor Aubrac, écrivain dramatique à succès pour laquelle il s’est inspiré des traits de caractère de ses meilleurs amis dont toutes les personnalités bien trempées sont cocasses, à la limite du burlesque. Entre un artiste homosexuel, deux sœurs névrosées (une dépressive et une colérique) et l’ex de sa femme, idiot ou carrément simplet, ça promet !
Quand les trois coups d’avertissement retentissent et que le rideau se lève, j’ai toujours cette excitation pétillante et enfantine à l’idée de découvrir le décor. Et puis la pièce commence et l’on découvre Victor Aubrac qui tente de convaincre sa femme Adeline de sa super bonne idée de sujet pour sa nouvelle comédie; il a depuis toujours les personnages hyperboliques tant recherchés pour ce genre de pièce sous la main, alors pourquoi aller chercher ailleurs ? D’où « Un stylo dans la tête » ou le concept que lorsqu’on a une idée en tête, on l’a pas ailleurs… !! Et alors que sa femme ne cautionne pas vraiment cette idée et émet franchement des réserves, Victor lui annonce qu’il les a tous invités à dîner ce soir pour leur annoncer cette grande nouvelle: il les a choisis comme protagonistes de son prochain succès!
Et leur réaction est indiscutable : c’est NON ! Ils sont tous consternés à l’idée que l’on puisse exploiter leurs tempéraments, leurs particularités, voire leur intimité et leur âme sur scène. C’est carrément du voyeurisme! Et la soirée vire vite au cauchemar et au règlement de comptes car chacun sent qu’on s’empare de sa vie et de tout ce de ce qui fait l’essence même de ce qu’il est.
Chaque personnage est hyperbolique dans son genre et c’est un peu le propre du théâtre de boulevard mais encore faut-il trouver le juste milieu; la pièce perd un peu de sa crédibilité en ça que les interprétations sont hétérogènes. Selon moi, et même si l’on s’attend à voir débarquer un dragon telle qu’elle est dépeinte par ses amis, Olga (Sophie Gourdin) est excessive dans la peau de la soeur colérique. On s’imagine que sa décision va être catégoriquement négative mais à la grande surprise de tous elle adooooore l’histoire car elle n’a pas lu le bon script. Bof… Sa soeur Karen (Valérie Even) est elle plus juste dans son interprétation de dépréssive chronique mais les clichés sur les hôpitaux psychiatriques et leurs patients sont trop répétitifs. Raoul (Eric Boucher) en ex éperdument amoureux exécute le « bouffon de service » à côté de ses pompes et qui ne comprend rien, mais son jeu est insignifiant et son personnage n’apporte rien à l’histoire. Son binôme, Adeline (Anne Canovas) est certainement une bonne comédienne mais encore faut-il que le rôle la mette en valeur, et associée à ce pauvre Raoul elle n’est pas très brillante. Heureusement, Victor (Francis Perrin) excelle dans le rôle principal et réhausse vraiment le niveau de jeu de cette troupe qui mises à part mes remarques critiques reste définitivement amusante et pleine de bonne humeur. Enfin, et c’est la bonne surprise de cette pièce pour moi, Raphaël (Xavier Goulard) ou l’homosexuel galeriste d’art, est passionnant de réflexions hilarantes, de mimiques justes, d’intonations de voix bien placées et de « cascades comiques » …
En définitive, malgré quelques personnages un peu caricaturés, le sujet présenté est intéressant. Et entre petites manies, tics, tocs et grandes tares dans lesquelles chacun pourra se reconnaître, on passe un très agréable moment. Cette pièce pose toutefois quelques questions de conscience passionnantes, à savoir: peut-on rire de tout ? Quelle est la limite à ne pas franchir? Peut-on plagier ses proches sur scène ? Peut-on écrire sur ses amis et les garder? Nos traits de caractère nous appartiennent-ils ? Alors pour trouver les réponses à ces questions, direction cette pièce de boulevard sympa qui se laisse voir… mais attention il ne vous reste plus que 2 jours pour la découvrir !!
24, boulevard Poissonnière
75009 Paris
Tel. 01 47 70 52 76